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L'influence grandissante des églises américaines en Afrique

9 avril 2024

Les grandes campagnes visant à restreindre les droits de la communauté LGBTQ en Afrique trouvent souvent leur source dans un lobbyisme des églises fondamentalistes des Etats-Unis très imprégné sur le continent.

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Ombres de deux réfugiés LGBT sur un drapeau arc-en-ciel devant le bureau de l'agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), à Nairobi, au Kenya.
La diversité en Afrique est menacée par l'influence de groupes ecclésiastiques américains d'extrême droite Image : Ben Curtis/AP Photo/picture alliance

Depuis les années 2000, les églises chrétiennes fondamentalistes américaines, profondément homophobes, anti-avortement et niant la transidentité, gagnent de plus en plus d'influence dans la société et la politique en Afrique. Haley McEwen, sociologue à l'université de Göteborg, enquête sur les coulisses de ces puissants réseaux.

"Protection du noyau familial"

Elle explique que les réseaux américains d’activistes conservateurs qui se qualifient de "pro-famille" sont exclusivement intéressés par la protection et la défense d'un certain type de famille : la famille hétérosexuelle, monogame et mariée. En Afrique, leur objectif principal est alors de convaincre les gouvernements, notamment par le biais de conseils ou de formations qui présentent l'homosexualité et la diversité de genres comme des importations étrangères menaçant les sociétés africaines, pour qu’ils soutiennent ensuite leur politique auprès des Nations unies.

Des manifestants anti-LGBTQ brandissent des pancartes rouges avec des slogans LGBTQ-phobe lors d'une manifestation à Nairobi, au Kenya
Les activistes anti-LGBTQ n'hésitent pas à organiser des manifestations dans les ruesImage : Thomas Mukoya/REUTERS

Irungu Houghton, directeur d'Amnesty International au Kenya, souligne que "la haine attisée par ces groupes ne s’inscrit pas dans l'histoire du Kenya ou de l'Afrique en général. Mais c’est elle qui crée les conditions pour la violence et les attaques contre les personnes de la communauté LGBTQ sur le continent".

L’influence dépend de l’argent

Le mouvement africain pro-famille s'est ainsi de plus en plus développé de lui-même, mais, comme l’affirme MecEwen, le succès des campagnes africaines dépend toujours en grande partie des investissements étrangers.

Des militants anti-avortement et pro-famille tiennent des pancartes lors d'un rassemblement de prière organisé par CitizenGo, pour protester contre l'agenda de l'avortement à la CIPD25 (Conférence internationale sur la population et le développement) qui se tenait à Nairobi, le 14 novembre 2019.
Des mobilisations anti-avortement voient le jour en AfriqueImage : Simon Maina/AFP/Getty Images

La plateforme médiatique internationale indépendante "OpenDemocracy", basée à Londres, indique par exemple dans une enquête de 2020 qu’une vingtaine de groupes chrétiens américains ont dépensé au moins 54 millions de dollars en Afrique depuis 2007 ; des groupes connus notamment pour leur lutte contre les droits LGBTQ.

Peine de mort pour les homosexuels en Ouganda 

En Ouganda ou au Ghana par exemple, l'influence du groupe ultra-conservateur de l'Arizona "Family Watch International" se fait ressentir jusque dans l’adoption des lois. 
Le président ougandais Yoweri Museveni a ainsi signé en mai 2023 une loi anti-homosexuels faisant risquer la peine de mort aux homosexuels ainsi que 20 ans de prison pour les groupes d'activistes LGBTQ.
Au Ghana, le parlement a d'adopté récemment une loi qui renforce les sanctions pour les actes homosexuels consentis et qui criminalise les personnes et les organisations de défense des droits des personnes LGBTQ. 

Des manifestants portent des affiches rouges avec des inscriptions en jaune contre la loi anti-homosexuels en Ouganda
Des manifestations contre la loi ougandaise qui menace d'infliger la peine de mort aux homosexuels ont eu lieu en Ouganda, mais aussi en Afrique du SudImage : Themba Hadebe/AP/picture alliance

Un phénomène mondialement présent

Mais cette évolution que l'on observe dans plusieurs pays africains, ne se cantonne pas à ce continent, comme l’explique McEwen : des lois contre l'homosexualité voient également le jour en Hongrie, en Russie ou encore en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis.

Comme elle le dit si bien, cela ne doit donc pas être un facteur de mépris envers le continent Africain : "Nous ne devons pas étiqueter l'Afrique comme un continent homophobe ou comme quelque chose de spécial simplement parce que ces lois y existent."